L'Echo du bâtiment végétalisé n° 80

L’eau est essentielle à la vie, notamment celle des végétaux et, en particulier, lorsqu’ils se trouvent sur une toiture. Une toiture végétalisée présente des conditions limitantes pour la végétation de part sa nature hors sol et le plus souvent sa faible épaisseur. L’apport d’eau par irrigation ou arrosage permet à la toiture d’offrir de nombreux services écosystémiques tels que la lutte contre l’îlot de chaleur urbain ou l’accueil de la biodiversité. Néanmoins, l’eau est aussi une ressource précieuse et la question de sa provenance et de son utilisation/usage doit être posée.

Les RP TTV encadrent la pratique de l’arrosage : c’est l’objet de cet Echo du Bâtiment Végétalisé.

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Quelle que soit sa provenance, l’eau doit être utilisée de façon raisonnée afin d’éviter tout gaspillage, y compris par un choix adapté des espèces végétales. Il importe d’avoir toujours à l’esprit que l’arrosage sur les toitures végétalisées doit être réalisé uniquement dans l’optique de compléter les besoins des plantes qui ne sont pas satisfaits par la pluviométrie. On parle alors d’arrosage de sauvegarde, afin d’assurer leur pérennité.
 
Les RP TTV consacrent une annexe (annexe F) à la gestion de l’arrosage pour les toitures et terrasses végétalisées.

Besoins en eau

 
Afin de dimensionner l’apport d’eau destiné à l’arrosage, on va prendre en compte, d’une part le besoin en eau des plantes de la toiture (variable selon les espèces, la localisation géographique et la période de l’année) et d’autre part la CME (capacité maximale en eau) du complexe de végétalisation. Il en résulte une quantité d’eau à distribuer selon une fréquence de fonctionnement.
Cependant, les volumes d’eau apportés ne doivent pas être supérieurs à la capacité de rétention en eau du substrat afin d’éviter son lessivage vers les gouttières. Il est ainsi recommandé de fractionner les apports et de les répéter afin de permettre une bonne diffusion de l’eau dans le substrat entre deux cycles d’arrosage.

A noter que la gestion de l’arrosage peut être optimisée grâce à une mini-station météo qui permet de tenir compte des précipitations à venir, et le cas échéant d’extrapoler l’ETP (Evapotranspiration potentielle) (1).
 
 

Point d’eau

 
Les RP TTV spécifient qu’un point d’eau est obligatoire sur toute toiture ou terrasse végétalisée. Elles précisent que tout point de la terrasse devra être situé à moins de 30 m de ce point d’eau. Lorsque la toiture ou terrasse est constituée de plusieurs surfaces indépendantes, plusieurs alimentations en eau doivent être prévues.
 
A noter que, dans le cas d’un arrosage automatique, l’installation en amont devra être pourvue d’un disconnecteur et d’un système de régulation de pression des différentes terrasses.
Les RP TTV précisent les débits et pressions dynamiques (2) recommandés pour l’arrosage en fonction de la surface de la toiture végétalisée :
 
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Les différentes typologies d’arrosage

 
L’arrosage peut être :
  1. Soit manuel, avec un simple tuyau branché sur le point d’eau, ou avec une lance ou des asperseurs mobiles. Il nécessite le déplacement régulier de la source d’arrosage sur toute la surface, ce qui présente des limites à partir d’une certaine surface.
  2. Soit intégré avec déclenchement automatique ou manuel par :

 

Aspersion

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Goutte à goutte

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En surface (comme dans l’illustration ci-dessus) : il est recommandé de faire en sorte que les bulbes hydriques (4) se rejoignent afin d’obtenir un coefficient d’uniformité de 100 % sur toute la surface.
Avec des tuyaux enterrés, il est obligatoire de disposer de goutteurs anti-siphon pour éviter l’intrusion de particules de sol à l’arrêt de l’arrosage ou lors de pluies importantes.

 

Capillarité ou toile d’irrigation

 

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L’épaisseur de substrat mise en place sur la toile d’irrigation doit permettre à la végétation d’être en contact avec l’eau distribuée. Les goutteurs intégrés doivent bénéficier d’une protection anti-racine pour éviter la pénétration de radicelles dans les tubes enterrés. Ils sont avantageusement de type anti-siphon afin d’empêcher l’aspiration des contaminants externes dans le goutteur.

 

Quelques recommandations

  • Ne pas arroser en plein soleil (sauf pour les systèmes d’irrigation enterrés comme les toiles d’irrigation) sauf durant la période d’installation des végétaux, (dans tous les cas, l’arrosage hors des périodes de plein soleil est préférable, nous y reviendrons dans le prochain Echo du Bâtiment Végétalisé).
  • En été, arroser en début ou en fin de journée ou de nuit, donc éviter la pleine journée.
  • Eviter d’arroser dès que la vitesse du vent dépasse 20 km/h lorsque l’arrosage se fait par aspersion.
  • S’assurer visuellement de l’adéquation des durées d’irrigation en contrôlant un éventuel lessivage au niveau des descentes d’eau pluviales en toiture à l’issu du cycle d’arrosage.
  • Ne pas sur-arroser.
  • Faire appel à une entreprise spécialisée en irrigation (liste auprès du Synaa) pour l’étude, l’installation du système d’arrosage le plus adapté aux contraintes de la toiture, ainsi que la maintenance annuelle.
  • S’assurer avant la mise en œuvre du système d’irrigation que le diamètre des tuyaux mis en attente par le lot plomberie est adapté au débit/pression calculé lors de l’étude hydraulique du projet.
  • S’assurer de l’alimentation en eau du réseau pour le jour de la mise en place de l’irrigation.

 

Maintenance

La maintenance du système d’arrosage est essentielle pour sa pérennité. Elle comporte les points de vigilance suivants :

  • Mise en hivernage ;
  • Remise en route au printemps ; pour les programmateurs fonctionnant à pile, le remplacement de la/des pile(s) doit se faire chaque année à cette occasion ;
  • Contrôle régulier du fonctionnement des tuyères ou asperseurs ;
  • Vérification de la pression d’eau et de la bonne trajectoire du jet ou orientation, etc.
Pour ce faire, il importe de se référer aux règles professionnels P.E.4-R0 « Travaux de maintenance des systèmes d’arrosage » éditées par l’AFDJEVP/AITF/FFP/SYNAA/UNEP et à l’annexe I des RP TTV (Echo du bâtiment végétalisé en parlera dans son n°82 consacré à l’entretien).

La survie d’un système de végétalisation en toiture peut être conditionnée par le bon fonctionnement de son système d’irrigation ; de même, les services rendus par la végétation sont d’autant plus nombreux et effectifs que la végétation est en bonne santé.
 
 
(1) Evapotranspiration potentielle (ETP) : quantité maximale en eau susceptible d’être évapotranspirée sous un climat donné par un couvert végétal continu bien alimenté en eau. Elle comprend l’évaporation du sol et la transpiration de la végétation dans une région donnée pendant une période de 24 h. Elle s’exprime en hauteur d’eau (mm) et est donnée pour une culture de référence (couvert de graminées non arrosées).
(2) La pression dynamique est la pression exercée par un liquide en mouvement sur les parois d’une canalisation ou à la buse d’un asperseur. Elle se mesure en pascals ou en bars (1 bar = 103 Pa). Elle est la pression de référence utilisée pour le dimensionnement du réseau.
(3) Coefficient d’uniformité : coefficient qui mesure l’homogénéité de la quantité d’eau apportée par unité de surface.
(4) Bulbes hydriques : dans l’irrigation au goutte à goutte, zone humide qui se forme dans le sol autour de chaque goutteur.